Le président nigérian Muhammadu Buhari (2eme a droite) assiste à la 60e célébration de l'indépendance du pays sur la place Eagles à Abuja, au Nigéria, le 1er octobre 2020. /AFP/Kola Sulaimon
Alors que toute l’attention du monde occidental est focalisée sur la guerre en Ukraine, les « provinces » extérieures de Daech continuent à être très actives et même à gagner du terrain dans la zone des trois frontières au Sahel.
En ce début d’année 2023, la situation au Mali paraît désespérée, très grave au Burkina Faso et au Niger et plus qu’inquiétante au Nigeria.
Dans ce dernier pays, la Province de l’État Islamique en Afrique de l’Ouest (ISWAP, Islamic State - West Africa Province) a revendiqué une tentative d’assassinat le 2 janvier du président nigérian, Muhammadu Buhari présenté comme un « tyran apostat ».
Selon des médias locaux, déjà le 29 décembre, une explosion était survenue dans la ville d’Okene de l’État de Koné. Cette localité située à 270 kilomètres au sud-ouest d’Abuja, avait causé la mort de quatre personnes. Cette action avait été revendiquée par l’ISWAP qui avait ainsi démontré ses capacités à sortir de sa zone d’influence principale située au nord-est du Nigeria.
Le 2 janvier, le groupe jihadiste a frappé la même localité avec l’explosion d’une voiture piégée qui a tué quatre gardes du palais du gouverneur d’Okené, Yahaya Bello.
L’ISWAP prétend avoir voulu assassiner le président du Nigeria, Muhammadu Buhari, qui devait y inaugurer un hôpital situé à moins d’un kilomètre du palais du gouverneur. Heureusement pour lui, la charge a explosé une demi-heure trop tôt.
Et pourtant Buhari est en fin de mandat, la Constitution nigériane de 1999 l’obligeant à abandonner le pouvoir à l’issue de l’élection présidentielle du 25 février 2023.
L’ISWAP (Islamic State - West Africa Province)
Créé en 2002, le groupe jihadiste Boko Haram s’est divisé en 2016 en deux factions après que Abubakar Shekau - son chef historique - ait contesté le choix de l’État islamique d’installer Habib Yusuf dit Abou Musab al Barnawi comme nouvel « émir ». Refusant de se soumettre à l’autorité de ce dernier, Shekau acculé dans la forêt de Sambisa par l’ISWAP s’est suicidé en mai 2021.
Son émir, Abou Mousab al-Barnawi (2015-2019 puis depuis 2021) qui a été donné pour mort en mars 2021 serait toujours vivant et dirigerait la Choura (« Conseil », organe dirigeant du mouvement) de l’ISWAP. Il aurait développé des liens avec l’État islamique dans le Grand Sahara (EIGS).
Comme en Syrie et en Irak en 2014-2017, l’ISWAP a développé un proto-État dans les régions qu’il contrôle. Il est séparé en quatre gouvernorats, Lac Tchad, forêt de Sambisa, Timbuktu et Tumbuma, qui bénéficient de leur propre wali (gouverneur) et chef militaire. Ces derniers gèrent la vie des populations via leur « administration » qui, en particulier, lève l’impôt. Deux représentants de chaque gouvernorat siègent au sein de la Choura.
En 2020, le Département de la Défense américain estimait ne nombre de combattants entre 3.500 et 5.000. D’autre observateurs estiment ce chiffre plus élevé (jusqu’à 18.000).
A la fin 2022, plusieurs groupes de l’ISWAP ont prêté allégeance au nouveau « calife » de l’État islamique, Abou Al-Hussein al-Husseini al Qourachi qui a officiellement succédé le 30 novembre 2022 à Abou al Hassan al Hachimi al Qourachi tué le 15 octobre 2022 à Deraa en Syrie.
Le problème est que l’ISWAP n’est pas le seul mouvements salafiste-jihadiste actif au Nigéria. Il faut aussi compter avec Ansaru qui est inféodé à Al-Qaida « canal historique ».