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Monde

La réforme de la politique économique de l’Egypte: le gage d’opportunités offertes après son adhésion au BRICS

Le Dialogue

Au  lendemain de l’annonce faite par le groupe des BRICS - qui regroupe le Brésil, la Russie, l’Inde, la Chine et l’Afrique du Sud- d’inviter l’Egypte et cinq autres pays, avec à leur tête  l’Arabie Saoudite,  les Emirats Arabes Unis,  l’Iran, l’Ethiopie et l’Argentine à le rejoindre à partir de janvier 2024, les mass-médias en ont marqué leur réjouissance par une grande célébration. Ce quintette  réunit des pays en  développement qui  visent  à établir un  nouvel ordre international  multipartite qui défende leurs droits et intérêts  face à un  autre ancien que les Etats Unis  tentent  d’imposer fortement au  monde. Il  est du droit  de l’Egypte de s’en  féliciter: si le  groupe y a fixé son choix,  c’est parce qu’elle jouit d’un grand prestige géostratégique et politique dans le  monde. En outre, il  marque un enchevêtrement  des intérêts d’un marché  qui  compte 120 millions d’âmes (dont les touristes et réfugiés)  avec ceux des pays du BRICS  notamment  la Chine, la Russie,  l’Arabie Saoudite  et  les EAU. Pourtant, la célébration  ne doit aucunement  être une occasion  d’occulter la vérité ou  de se dérober  aux responsabilités. Devenir  membre d’un  tel  groupement fait plier l’Egypte sous des charges accablantes: elle aura-par conséquent-  la main  haute et  non  basse. Et, pour  qu’une telle  commémoration soit  équilibrée,  elle doit porter  sur  les éléments de force que le  BRICS pourrait offrir à l’Egypte comme ce qu’elle lui porterait afin que les deux parties entretiennent réciproquement une relation  saine et durable.

Il  est vraiment  étonnant  que cette nouvelle  soit accueillie au son  du tambour  comme également celle prévoyant la prospérité qui  régnera du  fait de côtoyer  les « frères arabes »  ou  de « fouiller  au fond même de la terre comme dans les eaux profondes » dans une chasse aux trésors enfouis  et au patrimoine de nos ancêtres  décliné  dans le gaz  naturel,  le pétrole,  l’or  et  les métaux  précieux.  Certains sont allés  jusqu’à  annoncer la grande nouvelle  que le prix des produits de consommation  courante  vont baisser  et qu’ils se trouveront en  abondance sur le  marché, qu’on  surmontera la pénurie  du dollar,  que  son taux de change  va baisser sur le marché parallèle, que les offres d’emploi  augmenteront et qu’une prospérité  démesurée régnera dans le  pays.  De telles nouvelles pourraient être mobilisées par la bonne intention  et avoir pour objectif  de  soulager la peine de la population  ou  de pallier à  ses souffrances.  Des ministres et responsables ont  déclaré que la voie  est  pavée en  vue d’accroitre les investissement et de dérouler le tapis rouge  aux investisseurs  richissimes  qui s’apprêtent  à  atterrir en  Egypte.  Des annonces à moitié vraies : l’Egypte  recèle de grandes richesses;  néanmoins les relations qu’elle noue avec les nouveaux et anciens membres du BRICS se traduisent  par  des accords de coopération  économique de tout  bord qui  dénotent  des  indices non  négligeables. 

 

Un  déficit  commercial colossal 

De  ces indices,  nous citons à titre d’exemple  le  grave déséquilibre  qui  caractérise les relations entre  l’Egypte et les Etats  du  BRICS avant  son  élargissement. Se référant  aux chiffres du  commerce international,  nous signalons que les exportations  des membres du  BRICS vers l’Egypte en  2021 ont  atteint 28,6 milliards de dollars dont 18,1 milliards de dollars (soit 63%  de la valeur globale) en  provenance  uniquement de la Chine. S’ensuivirent par ordre décroissant 17,5%  pour la Russie  qui  occupe la deuxième position  suivie de l’Inde,  du  Brésil et de l’Afrique du  Sud  en queue  de la liste respectivement  à  11,6%, 7,3% et 0,4%,  En contrepartie,  les exportations égyptiennes pour  ces pays- également en  cette même  année- ont  atteint  uniquement 5 milliards de dollars  dont plus de la moitié (2,51  milliards de dollars) de pétrole brut à  destination de  l’Inde  uniquement, En  d’autre  termes, la balance  commerciale entre l’Egypte et les pays du  BRICS a accusé seulement en  cette même année un déficit de 23,5 milliards de  dollars  soit environ  70%  de  la valeur  globale du  commerce réciproque. Enfin, le déficit avec la Chine a atteint 17 milliards de dollars en  une seule année  soit près de 1555%  de la valeur totale des exportations de l’Egypte vers la Chine!  

Selon  les  dernières chiffres internationaux  disponibles, la valeur du  commerce commun  a baissé au cours des premiers mois de l’année en  cours à  cause de la pénurie du  billet vert,  des restrictions  administratives  imposées aux échanges commerciaux entre l’Egypte et  le monde    en vue d’économiser le dollar non  disponible  officiellement que par la voie  administrative. A titre d’exemple,  les échanges commerciaux  entre la Chine et  l’Egypte ont rétrogradé  en mai  dernier en  raison  de la baisse des exportations de la Chine vers l’Egypte  d’une valeur  de 1,14 milliard de dollars  contre 1,23  milliards de dollars  au cours du  même mois de  l’année dernière,  accusant une baisse   de  85,6  millions de dollars d’un  taux de  près de 7%. , ses importations de l’Egypte ont fait  un  bond de 50 millions de dollars,  d’un taux de 61% pour atteindre 132  millions de dollars contre 82  millions le même  mois de cette  même année. La baisse  du commerce  revient  principalement  à une diminution  du niveau  des  exportations vers la Chine. Il  en  est de même,  une régression  est relevée avec chacun  des pays du  groupe du BRICS  avec un  déficit écrasant  avec tous les pays du  BRICS en tant que groupe.

Ces signaux  nous renseignent  sur  la faiblesse structurelle  extrême  de la production en  Egypte qui  exige  avant toute chose  sa hausse et sa diversification  d’un point de vue  général de  manière à  ne pas tabler fortement sur les exportations de pétrole,  de gaz  naturel, de  fruits,  d’orange et de produits agricoles. Il  est bien connu  que les exportations égyptiennes en produits  non  pétroliers bénéficient  d’un  grand soutien au  dam  du budget de l’Etat. Nous savons très bien  que les exportations  globales de produits agricoles au  cours de ce dernier exercice  sont inférieures à la valeur des importations  de  blé  de l’étranger. Hormis l’agriculture, la réforme de la structure de production  industrielle par  l’ajout de nouveaux  projets durera entre trois et  cinq ans en vue de réaliser  l’équilibre  financier entre les dépenses et les ressources dans les nouveaux projets  pour passer  ensuite à la phase de  réalisation des bénéfices. Et,  afin  que le secteur  industriel soit capable  de gagner  la bataille de la concurrence sur le marché local  et de hausser le niveau  des normes industrielles pour réaliser son  incursion  dans les marchés  internationaux  et être à la hauteur de  la compétition  qui s’y  déroule exigeant  ainsi de grands investissements  dans le domaine de la technologie de la production et de la gestion  de l’économie.

 

Investissement  étranger  limité en  industrie

Bien  que l’Egypte  ait obtenu des investissements colossaux de la part des pays du  Golfe son secteur  tertiaire,  avec à sa tête l’agriculture et l’industrie,  n’a réalisé  aucune mutation  substantielle pat l’augmentation du pouvoir  concurrentiel soit sur le marché interne  ou externe,  une part  infime de ces investissements s’est  dirigée vers les secteurs de la production industrielle  et plus particulièrement vers celui  des industries alimentaires.

L’Egypte  se livre actuellement à l’étude approfondie des chances d’investissements  dans les nouvelles zones  de développement  surtout celle  économique du  Canal de Suez. Elle participe également  avec la Chine,  l’Inde et la Russie  au  sujet des offres de  développement industriel  dans la zone  économique à travers des projets  prometteurs dans l’industrie  automobile,  des produits chimiques,  des vêtements et de l’énergie  verte. Néanmoins, la politique économique de l’Etat  hôte de projets d’investissements étrangers est la clef  de  voûte de  leur  réalisation de  rendement. Très  souvent, la mise en  œuvre du projet  pourrait  être entravée en  cours de  chemin ou  ne pas être  lancée dès le départ. C’est le  cas  de  quelques investissements des membres du BRICS  dont la Russie  dans la zone industrielle de la ville de Borg El Arab.  Par contre,  dans la  zone industrielle  du Canal  de  Suez, les travaux  y  sont menés  avec acharnement de  manière à présager  des conditions extrêmement  favorables pour  accroître  davantage les investissements déclarés  qui se caractérisent par une augmentation du taux d'exportations escomptées.

En  d’autre terme, il  importe de reconnaître  que les aides étrangères  et  les investissements étrangers directs sont  d’une importance  majeure soit  dans le cadre du  groupe de  BRICS  ou autre. Mais, dépourvus de la volonté locale en  premier lieu  et de l’aptitude à  rejoindre la course mondiale,  ils sont  insuffisants  à  réaliser la transition  économique  requise en Egypte. Les investissements étrangers requièrent  des politiques économiques adéquates et  des modes de gestion  clairs,  une grande flexibilité  et une transparence  du  système bancaire afin  de faciliter les démarches entreprises par les investisseurs à l’intérieur  des divers services de l’Etat,  de les aider  à accomplir leurs travaux avec  diligence  et sans complication  ainsi  que de gérer leurs activités économiques et financières  selon les règles de  la coutume internationale. Nous devons reconnaître  que l’Egypte  entretient de  grandes relations  historiques avec les principaux  pays du  BRICS  ainsi  qu’avec les autres qui y  adhéreraient  à partir de  janvier  prochain.  Elle  est liée à la plupart  d’entre eux par des  conventions commerciales qui  renforcent les chances de coopération  économique, commerciale, financière et les investissements communs. Dès aujourd’hui,  il incombe donc  à l’Egypte- au  niveau du  gouvernement et des secteurs commerciaux locaux-  d’adopter  un mode  de  traitement vigoureux  et  stable avec tous les investisseurs étrangers, les membres du  BRICS et  autres à moins de gâcher  de  longues années à  venir sans parvenir  à  des résultats tangibles.

 

Les retombées néfastes  des dettes extérieures

Vu  que la dégradation  de  la crise  des dettes intérieures et extérieures constitue la plus grande  débâcle des gouvernements égyptiens successifs depuis 2016,  la date  de l’obtention  d’un crédit  de  douze milliards de  dollars du Fonds Monétaire  International (FMI), il  importe  de  se  rendre compte de la gravité  de la situation  actuelle après  que les dettes extérieures ont quadruplé  dans moins de sept ans  pour atteindre 165milliards de dollars. Cette  crise fatale émane de la hausse de la valeur du  service de  la dette extérieure et intérieure qui  épuise 18% du  Produit  Intérieur Brut (PIB)  qui  est viré au  profit  des créanciers. Et,  avec la baisse  dramatique du niveau  des épargnes en Egypte, l’économie se trouve dans  l’impossibilité d’assurer des ressources suffisantes pour stimuler des investissements locaux nécessaires  ou  conclure des partenariats  économiques avec des investisseurs étrangers.  Ce panorama   de la conjoncture  financière est  terrifiant pour  l’investisseur  sérieux qui  cherche  à établir des investissements à long terme de la part  du BRICS,  de la Corée  du  Sud ou  autres. Les responsables de la politique économique  doivent en  fait savoir  que l’investisseur à long  terme  est un investisseur  intelligent qui  accorde la priorité  au climat  sain  et stable de la politique économique à long  terme.  Quant aux simples chances  ou  les à-coups à  court terme,  ils font appel  aux spéculateurs et  aux investisseurs dans les secteurs marginaux ou parasitaires.