La Chine est actuellement le nombre dur dans les relations internationales non seulement du fait de sa force économique, militaire et technologique mais aussi grâce à son rôle diplomatique resplendissant et son adoption d’une politique étrangère active de par le monde et son lancement de grandes initiatives à l’instar de celle de la médiation entre la Russie et l’Ukraine qu’elle a annoncé à l’occasion du premier anniversaire de la déclaration de la guerre en février 2023. Au cours des dernières années, la Chine s’est contentée de déclarer sa position vis à vis des questions internationales par son représentant au Conseil de Sécurité et à l’Assemblée générale des Nations Unies ; Ce comportement a fait l’objet d’un grand changement que la Chine a procédé à concrétiser des rôles directs vis à vis des deux parties belligérantes. Elle s’est proposé alors de résoudre, par la voie pacifique, les problèmes politiques et sécuritaires ; d même qu’elle a tenté les Etats en conflit à augmenter leurs investissements et à accélérer le développement dans ces pays aussitôt qu’ils auront fait taire les armes : les littératures chinoises appellent cette attitude par « l’investissement dans la stabilité ».
Cette position chinoise n’est pas née du jour au lendemain. Elle est le fruit d’une évolution graduelle de la diplomatie douce de la Chine et la mise en évidence de sa vision géostratégique du monde et qui s’est concrétisée à travers l’initiative « la ceinture et la route » et l’initiative de coopération entre la Chine et la Ligue arabe dans le domaine de la sécurité des informations, l’initiative de la sécurité mondiale et l’initiative de création d’un cadre sécuritaire commun, complémentaire, coopératif et durable au Moyen-Orient.
Je mets en exergue à ce propos deux aspects du rôle politique de la Chine au Moyen-Orient à partir de décembre 2022 : le premier est représenté par les trois conférences au sommet tenues, à Riyad en décembre 2022, par le président chinois avec l’Arabie Saoudite , les pays du Conseil de Coopération du Golfe et les pays arabes. Ces trois conférences sont constitué un point de virement important dans les relations entre les deux parties :elles ont illustré l’évolution importante de leurs relations commerciales, et économiques et que la Chine est devenue le premier partenaire commercial du monde arabe depuis 2020 d’une part et ont frayé la voie à un plus grand rôle chinois dans la région d’autre part. Le communiqué sino-saoudien a confirmé l’élargissement de la coopération bilatérale à l’échelon militaire, sécuritaire, de la lutte contre le terrorisme, la sauvegarde de la sécurité et de la stabilité régionale ; Quant au communiqué publié par la Chine et les pays du Golfe, il a cité la détermination de la Chine de contribuer à la sauvegarde de la sécurité des pays du Golfe et de mettre au point une infrastructure sécuritaire globale dans la région. Le communiqué sino-arabe a déclaré l’élargissement de la coopération dans le domaine du renforcement du dialogue stratégique, des contacts entre les armées et des relations bilatérales entre les ministres de la défense et de la sécurité ainsi que l’augmentation du nombre des manœuvres militaires communes, l’exécution des programmes de coopération dans le domaine de la télédétection et des communications satellitaires.
En outre, des revendications d’un rôle chinois accru ont été formulées au cours du sommet sino-arabe. A titre d’exemple, le président du Conseil présidentiel libyen Mohamed El Mansi a appelé la Chine à endosser un rôle plus grand- conforme à son poids sur le plan international- dans la résolution des problèmes de son pays.
Apparemment, la Chine tenait à développer ses relations avec les pays du Golfe : le communiqué publié par les deux parties signalaient les situations concernant les îles de Grand et petit Tumb et l’île de Abou Moussa ainsi que les négociations du programme nucléaire iranien provoquant ainsi le courroux de l’Iran que dénote le communiqué de son ministère des affaires étrangères qui exprime son profond mécontentement pour la pure et simple raison qu’il considère ces trois îles comme partie intégrante des territoires de l’Etat iranien. La Chine confirme toujours sa propre conception globale de la sécurité du Golfe qui englobe les pays arabes et l’Iran. C’est dans ce contexte qu’elle a poursuivi la médiation commencée par l’Irak et le sultanat d’Oman entre l’Arabie Saoudite et l’Iran. Le 10 mars 2023, Pékin a déclaré que les deux pays sont convenus de la reprise de leurs relations diplomatiques et d’ouvrir les ambassades dans deux mois. Le sens stratégique surprenant est la réussite de la médiation chinoise dans une région conçue historiquement comme étant exclusivement une zone d’influence occidentale. Deuxièmement, la Chine a renouvelé l’intérêt qu’elle porte au conflit palestino-israélien. Le 20 mars, wang Yi, le coordinateur du bureau du comité des affaires étrangères centrales du parti communiste, a annoncé une initiative visant à résoudre le conflit. Quatre jours plus tard, il a annoncé que la Chine adresserait des invitations à des personnalités palestiniennes et israéliennes pour tenir un dialogue autour de cette initiative.
Le 18 avril, le ministre chinois des affaires étrangères Chen Gang a contacté ses deux homologues israélien et palestinien pour leur affirmer la nécessité d’entreprendre les mesures indispensables en vue de reprendre les négociations de paix sur la base du principe de la solution des deux Etats en notant que la Chine est prête à offrir les conditions qui y seront favorables.
A cela s’ajoute qu’au cours de l’année 2023, les pays arabes ont fait montre d’une tendance accrue à utiliser la monnaie chinoise l’yuan : l’Egypte envisage d’émettre des obligations en yuan à vendre sur le marché chinois en juillet prochain, la Banque chinoise d’exportation et d’importation a octroyé un prêt en yuan à la banque nationale saoudienne, le Koweït a traité en yuan à la bourse chinoise. Néanmoins, la meilleure évolution en ce sens était l’adoption de la monnaie chinoise l’yuan - en remplacement du dollar- par la banque centrale irakienne dans ses transactions avec la Chine.
Le rôle de la Chine jouit d’une grande crédibilité au Moyen-Orient, vu qu’il est basé sur l’échange des intérêts économiques, la non interférence dans les affaires internes des pays, la coopération avec tous les pays sous réserve des différents régimes et tendances politiques. Ce rôle a acquis plus de force et de prestige en raison du recul de la présence américaine dans la région et la recrudescence des doutes de ses pays au sujet de la crédibilité de l’allié américain à honorer ses engagements.
Du reste, une question demeure sans réponse : la Chine désire-t-elle effectivement supporter le coût de ce rôle politique et sécuritaire pour qu’on se trouve face à « l’instant chinois » au Moyen-Orient ou hésite-t-elle à l’accomplir à cause des exigences de la poursuite de la construction interne et les politiques américaines qui lui sont hostiles et que tout ce qu’elle fait actuellement est de saisir les occasions favorables qui s’offrent de temps en temps ?