Rien à comparer entre Fagala au XXIe siècle et Fagala au XIXe siècle.Du XIXe siècle jusqu’aux années soixante-dix, Fagala publie la moitié des livres parus en Égypte et un tiers des livres parus dans le monde arabe. Lorsque le train circule du Caire à Jérusalem jusqu’en 1947, les livres y ont été exportés vers la Palestine, puis vers la Syrie, le Liban et l’Iraq.
C’est dans la rue Fagala que voient le jours les œuvres de Naguib Mahfouz, d’Ihsan Abdul Quddous ainsi que les grandes maisons d’édition qui ont façonné le goût arabe pendant des décennies. Tout cela a disparu. Il n’en reste que quelques maisons d’édition, à savoir la Bibliothèque d’Égypte, Nahdet Misr (la renaissance de l’Égypte) et la Fondation arabe. Le reste des maisons d’édition l’auraient quitté si elles ne veillaient pas à imprimer le manuel supplémentaire. Sans l’adhésion au patrimoine historique, Dar al-Maarif (une ancienne maison de presse en Égypte) aurait également fermé son siège à Fagala.
Fagala est située sur la rive du Nil (en raison des marées, le Nil s’est rétrécit maintenant loin de la région). Des quartiers comme Shubra et Būlāq Aboul ‘Ula n’existaient pas encore. Par conséquent, lorsque les Arabes conquirent l’Égypte, Amr ibn al-As trouva dans cette région une petite forteresse et une garnison byzantine Qu’il vainquit. La région de Fagala était connue sous le nom d’Umm Danin, devenue ensuite un port sur le Nil qui recevait des bateaux de marchandises. Il s’appelait « al-Max » déformé en « al-Maqs ». L’origine du mot remonte à « almukous » (des taxes ou droits de douane), payés sur les marchandises importées. La terre du voisinage de Bab al-Sha’aria était une terre agricole fertile, rapidement devenue un parc pour les califes fatimides qui y construisent des jardins sur le Nil. Pendant le règne du calife fatimide al-Mustansir Billah, Bagdad devint possession des fatimide. Alors, il y avait au Caire une dame à la tête d’un groupe de chants pour les califes. Elle chanta un long poème devant le calife qui, à cette occasion, la dota des terres dans la région de Fagala. La terre entière fut appelée « la Tabbalah », c’est dire la chanteuse qui battait le tambour.
À l’époque ayyoubide, Qaraqosh construit un petit château dans la région connu sous le nom de Tour Maqs. Dans le Murail se trouvait une porte connue sous le nom de Bab al-Hadid « Porte de Fer ». La place Ramsès à côté de Fagala devint célèbre à cause de cette porte de fer, démolie à l’époque de Muhammad Ali.
Au fil du temps, le paysage a changé. Fagala fut abandonnée, à l’exception des terres agricoles cultivées avec du radis. Ainsi, son nom change de la terre de « Tabbala » à Fagala.
Lorsque les Français occupent le Caire, ils transformèrent le terrain en zone militaire. Ce fut l’occasion de réorganiser la rue Fagala, qui traverse la zone de Bab al-Hadid jusqu’à la zone al-Zahir et Bab al-Cha’ria. Quand Abbas Hilmy I revint au Caire et construit la banlieue al-Abbassyah. Cette zone commence à attirer l’attention en tant que zone résidentielle. Le premier qui y habita fut Tadros Effendi Aryan, dont la maison est située à côté de l’école des pères jésuites. Il était tellement satisfait qu’il construit dans la cour de sa maison des chambres pour ses enfants Aryan Bey, Karkur Effendi et Basili Pacha (qui était un consultant dans le grand appel).
D’autres personnalités connues, contemporaines de Tadros Effendi, vivaient à la même résidence Gad Effendi Shiha, qui travaillait dans le cercle d’Abbas Hilmy I. Il construit une maison à Fagala entre Darb al-Ibrahimi et al-Jabruni, entre la rue Clot Bey et la rue Fagala. Et il reste encore des traces au tournant de Shiha à Fagala. Ses enfants Wassef, Damian et Michael s’installaient dans cette maison. Saïd Pacha a béni Demian avec deux acres à côté de leur maison, alors Demian a construit un bâtiment n°5 Rue Saeed al Mahrani à Fagala. Ce bâtiment était le siège du journal al-Akhbar et de son imprimerie (ce n’est pas le journal al-Akhbar publié par Ali et Mustafa Amin qui parait jusqu’aujourd’hui). C’était aussi le siège du journal Misr et de son imprimerie. C’est le premier bâtiment de la rue Fagala. Sa construction remonte aux années 1856 après JC. La famille al-Gad a ensuite construit d’autres bâtiments résidentiels à Fagala. De nombreux contrats fonciers à Fagala remiontent toujours à la famille Gad. Michael Gad a construit également l’église de la Vierge sur son terrain à Fagala. Il en fit des dotations à dépenser pour l’églisse.
L’événement le plus important à Fagala était pendant le règne du Khédive Ismail, car après l’ouverture de la ligne de chemin de fer Le Caire-Alexandrie, sous le règne de Saïd Pacha, Fagala est devenue une zone touristique où la place Bab al-Hadid adjacente. Et ainsi les cafés et les petits hôtels s’y répandent. Cela a incité la famille Qatawy (une famille juive égyptienne dont les membres ont émergé dans l’activité politique et économique à la fin du XIXe siècle jusqu’à la première moitié du XXe siècle) à vendre leurs magasins à Fagala pour construire à leur place des bâtiments résidentiels. Mais à la périphérie de Fagala se trouvait une colline où les habitants de Bab al-Sha’aria et al-Zahir jetaient leurs ordures attirants les scorpions. C’est pourquoi elle fut appelée « Colline des Scorpions ». Habib Sakakini acheta la colline, nivelé son terrain et construit l’un des plus beaux palais du Caire, L’autorité organisatrice avait décidé d’organiser la rue Fagala en raison de son importance. Sa largeur est de 8 mètres. Cependant, Habib Sakakini déposa une pétition dans laquelle il expliquait l’importance de cette rue, demandait que sa largeur soit de vingt mètres, Khédive Ismaïl acquiesça sa demande, Ainsi, à Fagala, la rue Clot Bey croisa la rue Fagala à l’époque du Khédive Ismail. En conséquence, la presse et l’édition prospérèrent en Égypte, Fagala devenant une zone importante dans l’histoire de l’édition en Égypte. Habib Sakakini construit un bâtiment dans lequel il ouvrit un bureau de poste pour répondre à la circulation croissante jour après jour dans cette zone. Comme dans ses alentours.
Syriens et Libanais se sont installés à Fagala. Ils ont été le pilier du mouvement éditorial, après avoir fui en Égypte de la persécution des Ottomans. Parmi les maisons d’édition les plus célèbres de Fagala, à la fin du 19ème siècle et au milieu du XXeme, l’Imprimerie al-Maarif et sa bibliothèque, La Maison al-Maarif fondée par Naguib Mitri avec George Zidane en 1891. Cependant, George Zidane quitta cette maison d’édition et fonda à Fagala Dar al-Hilal et le magazine al-Hilal. Il y publia ses romans et livres les plus célèbres. Ajoutons aussi l’imprimer al-Ta’lif (L’Imprimerie des auteurs) de Fagala.
Le nombre des maisons d’édition à Fagala (du XIXe siècle au XXe siècle) s’éleva à 212. La plupart de ces maisons furent fermées ou déménagées. Cependant, certaines maisons y conservent encore leur ancien siège, comme Dar Nanda t Misr, qui publie des manuels étrangers.
Bien que la Fondation Arabe Moderne imprime et diffuse à partir de Fagala., elle est célèbre comme étant une référence académique en Égypte qui commente les manuels du ministère de l’Éducation. De plus, c’est cette Fondation qui publia les romans du Dr. Ahmed Khaled Tawfiq, dont les œuvres ont formé la conscience de générations depuis les années quatre-vingt-dix du siècle dernier.
La Bibliothèque d’Égypte, fondée par Said Gouda al-Sahar et Abdel Hamid Gouda al-Sahar en 1932, a fermé ses portes après avoir publié les œuvres des géants de la littérature en Égypte tels que Naguib Mahfouz (Elle adopta ses romans), Youssef el-Sebaei, Ihsan Abdel Quddus et Ali Ahmed Bakathir. Le nombre des titres de la maison dépassait dix milles. C’est un nombre record dans l’histoire des maisons d’édition arabes.
L’apogée des éditions à Fagala, comme nous l’avons dit plus haut, était associé au journalisme. La rue Fagala fut celle de la presse égyptienne. La plupart des journaux et des magazines l’ont pris comme siège social. Ses cafés ont prospéré servant de forums pour les journalistes, les écrivains et les hommes de lettres. De plus, il était habité par les propriétaires du journal al-Lataif, al-Muqattam, al-Muqtataf et Salim Effendi Sarkis. Sa grande renommée dans les pays arabes est due, en fait, à la publication du magazine Sarkis, qui créa des prix distribués aux écrivains.
Le poète Khalil Mutran vécut à Fagala comme le linguiste Socrates Spiro, devenu célèbre dans le monde entier. Parce qu’il rédigeait ses articles et ses livres en deux langues : l’arabe et l’anglais.
Lorsque nous passerons en revue les journaux et magazines égyptiens dans les archives de la Maison Egyptienne du Livre, nous verrons les titres suivants: La Revue al-Muhit, la revue Ramses, la revue Pharaon, la revue al-Muftah, le journal al-Omran, la revue al-Huquq, la revue Mizan al-Itidal. Elles étaient basées à Fagala. Alors que la diffusion de ces revues créa un mouvement culturel de dimension intellectuel sans précédent dans la région arabe.
Les cafés étaient célèbres, y compris celui de Ghantous Masoubè’, créé en 1891, fermé en 1916, Ces cafés étaient fréquentés par Ibrahim al-Yazigi, Mustafa al-Manfaluti, Suleiman al-Bostani, Ahmed Lotfi al-Sayyid et d’autres. Ce fut normal car le café ressemblait à un salon littéraire quotidien. Le propriétaire du café professionnalisa le journalisme publiant un journal hebdomadaire (publicité). Il publie ensuite une série de livres sous le titre (Librairie de Publicité). L’un des cafés les plus célèbres de Fagala fut Maqha Murad, dont les visiteurs étaient limités aux journalistes dont les rédacteurs en chef. Et le café des Champs-Elysées, célèbre comme lieu de rencontre des écrivains. De là, la renommée des poètes a fut lancée. Des pièces de théâtre furent écrites. Le propriétaire lui annexa une salle pour représenter les pièces.
La diversité ethnique, religieuse et sociale était l’avantage de Fagala. Jusque dans les années cinquante du XXe siècle, ce quartier ne connut jamais de violence ni de crimes. Par conséquent, les communautés chrétiennes commencèrent à y construire des églises dont l’église catholique romaine, construite sur un terrain donné par Habib Sakakini. Cette église se distingue par sa belle architecture. Elle fut inaugurée en 1906. Alors que l’église copte catholique, se caractérise par sa magnifique élégance architecturale que nous n’avons pas vue auparavant dans les églises d’Égypte. Les décorations de l’église catholique syriaque, construite en 1909, et de l’église catholique chaldéenne, construite par Helena Karima Anton Bey en 1903, sont impressionnantes. En plus, certaines écoles chrétiennes étaient associées à des églises, de sorte que Fagala est devenue un centre d’éducation et de connaissance.
Pour l’instant Fagala, les éditions ont reculé devant les magasins de dépôts de toute sortes et les articles sanitaires et les fournitures scolaires qui occupent 95% de la rue Fagala. Du coup, la voix cognitive de Fagala a baissé. L’Égypte, à son tour, a perdu la valeur de l’espace historico-culturel de cette rue dans laquelle des talents égyptiens et arabes éclosent. Muhammad Kurde Ali, ministre de l’Éducation en Syrie , et premier président de l’Académie de langue arabe à Damas, connu à travers ses livres et articles publiés à Fagala. Ainsi un grand nombre d’écrivains irakiens commencèrent-ils leur carrière à Fagala,
Il est peut-être regrettable que le patrimoine architectural de Faggala n’ait pas encore été découvert. Elle perdait donc ses traits de jour en jour. C’était là jusqu’aux années quatre-vingt du XXe siècle l’un des plus beaux palais du Caire, est le Palais de Boutros Pacha Ghali, qui a été construit dans le dernier quart du 19ème siècle et y a vécu Naguib Ghali et Wassef Ghali et d’autres drapeaux de cette famille. Mais il a été démoli et remplacé par des bâtiments résidentiels, et les documents de ce quartier, qui le datent comme les documents des maisons d’édition, se sont dispersés à l’extérieur et à l’intérieur de l’Égypte. Ou il a été perdu de perdre avec elle la biographie du quartier qui a formulé l’histoire intellectuelle et cognitive et l’histoire du journalisme en Égypte.