Accueil recherche MENU

Editos

La reine, une fois de plus

Le Dialogue

Aussitôt  le  buste splendide de la reine Néfertiti  découvert et  exposé, pour  la première  fois, au Musée  de Berlin  en  1924 qu’un  processus d’investigation  urgent  a été déclenché  à l’autorité  égyptienne des antiquités  qui -depuis  sa création  et jusqu’à  cette époque-  était dirigée  par  des égyptologues français. Suite à la consultation des dossiers des fouilles exécutées par les Allemands à  Tell el-Amarna  et les bordereaux  de  partage des antiquités entre le  musée égyptien et la mission allemande,  en  février 1913, s’est  confirmé l’acte  de tricherie et  de ruse commis par  Ludwig Borchardt,  le découvreur de  la tête  de Néfertiti afin  de la détenir  en cachette et  qu’elle ne soit  perçue ni par l’inspecteur  général  ni  non plus par  le  chargé d’affaires du  partage.

Après  avoir  acquis la certitude que l’Egypte a  le droit  de voir  restituée la statue de  la belle reine Néfertiti, Gustav Lefèvre  a adressé une lettre -  sur un ton ferme- au  gouvernement  allemand la revendiquant  de  suite, à moins  de suspendre les  missions  accomplies en Egypte  par toutes les équipes allemandes !! Le  ton inflexible de  la lettre,  envoyé en  1925,  a provoqué l’intervention diplomatique  entre  les deux parties : des réunions ont  été  tenues sans aucune  issue plausible :  ni  la tête de  la reine  ne fut récupérée  ni  les missions archéologiques allemandes  en  Egypte suspendues.

En  1929, le  gouvernement égyptien  a soumis une  demande officielle pour  restituer le  buste en  question et dédommager  l’Allemagne en  contrepartie  par d’autres pièces archéologiques convenues.  Demande rejetée  par l’Allemagne qui  conseilla l’Egypte de ne  plus penser  à cette question. Une  réponse  qui ancre  la  logique et  l’arrogance des grandes puissances coloniales à  cette  époque et  dont les rémanences persistent  jusqu’à nos  jours dans le traitement  des  pays les uns à l’égard des autres. 

les Egyptiens n’ont pas suivi  le conseil  et ont  soumis- une  fois de  plus- une requête  au  gouvernement allemand,  en  1933, après avoir  joui de la solidarité des grandes personnalités allemandes  et  à leur  tête Hermann Göring,  le responsable de la création  du Gestapo  et commandant  en chef des forces navales pendant la deuxième guerre  mondiale et  l’un  des héros de la première   guerre  mondiale qui entretenait de  bonnes relations  avec eux.  Ce dernier soutenait le  droit de  l’Egypte au  retour du buste de sa reine et a réussi à  convaincre Hitler de l’importance de ce rapatriement  qu’il  a accepté au départ  pour  tomber ensuite  sous le charme de la beauté de la reine qu’il  refusa de  le faire et envoya sa réponse à  la lettre avec la promesse de  bien traiter  Néfertiti  en Allemagne et de lui construire  un musée  spécial. J’avais déjà  cité  que l’Egypte a tenté,  en 1945,  d’exhorter  les forces armées américaines à lui  rendre la tête de Néfertiti  après l’avoir  trouvée  dans une ancienne mine de sel  mais cette demande  fut refusée  et les Américains  ont remis en 1956 la  tête de la reine au  gouvernement de l’Allemagne de l’ouest.

 

L’enthousiasme de l’Egypte de  restitution  de  la tête de Néfertiti flétrit  avec la révolution  égyptienne en  1952 et sa  tendance  à ne pas soulever de problèmes diplomatiques avec les pays étrangers  surtout  qu’elle en avait  assez de ses avec des grandes puissances tel le Royaume Uni qui  cherchait  à étendre son  emprise  sur l’Egypte ; sans omettre l’offre par Nasser  d’un  grand nombre  d’antiquités aux  rois, reines et  présidents   d’un grand  nombre de pays  dont des temples dans toute leur intégralité  soit  sous prétexte de  consolider les relations avec ces pays amis soit à  titre de remerciements pour  avoir  prêté la main forte  à l’Egypte  lors du sauvetage des monuments d’Abou Simbel  de la noyade  dans les eaux du  lac Nasser. Il  était  imprévu que l’Egypte revendique, sous son régime, le retour  de  ce buste. Cet état  des lieux  n’a pas vraiment  changé  sous la présidence  de Sadate : persista toujours cette politique d’offrir  des monuments aux   souverains et  chefs de gouvernements  ainsi qu’à  des personnalités  publiques proches de la présidence. Avec son  accession au  pouvoir,  Moubarak renonça à  cette  politique mais a  commencé  son mandat  en  entonnant l’assertion que la tête  de la reine était notre meilleure ambassadrice en  Allemagne. C’est  avec  ma nomination, en  2002,  secrétaire général  du Conseil  Suprême des antiquités  que j’ai  redonné vie  à ce dossier  classé de la reine Néfertiti.

A la semaine prochaine  pour  savoir le dénouement de cette histoire.